SurdiFrance 6 millions de malentendants Droit Pluriel : tous égaux face à la justice !

Droit Pluriel : tous égaux face à la justice !

Article rédigé par l’association Droit Pluriel, extrait du numéro 29 du magazine 6 millions de malentendants

Avez-vous déjà assisté à un procès ? Les personnes malentendantes convoquées en justice en gardent souvent un souvenir amer : difficile d’entendre le juge, surtout si l’audience implique plusieurs protagonistes. L’association Droit Pluriel s’engage pour rendre la justice accessible à tous.

Les professionnels de la justice ne savent pas toujours s’adapter : ils ne connaissent ni les conséquences de la surdité, ni la façon dont ils doivent se comporter. Par ailleurs, les préjugés sur le handicap persistent encore : il peut leur être difficile d’envisager qu’un parent malentendant soit capable de surveiller son enfant, qu’en entreprise la surdité puisse se compenser… Notre association Droit Pluriel reçoit des témoignages qui alertent sur l’urgence d’une justice sensibilisée à la surdité.

Depuis 2015, Droit Pluriel, accompagnée par le Défenseur des Droits, mène la mission « Professionnels du droit et handicap ». Elle a démarré par un état des lieux national qui conduit à des préconisations : le rapport de cette mission a été présenté au Sénat le 28 septembre 2017 et est consultable sur notre site droitpluriel.fr. La première solution dégagée par cette démarche sera la formation des professionnels de la justice, partenaires de la mission (magistrats, greffiers, avocats, notaires…). Tous suivront trois heures d’un module handicap : mise en situation et exercices devront leur permettre d’adopter les bons réflexes. Nous en sommes aujourd’hui à la phase de construction des outils pédagogiques.

“Ils préfèrent faire répéter ou risquer de répondre à côté plutôt que de dire leur handicap…

Un partenariat avec le Ministère de la Justice (SADJAV) nous permet déjà de former les professionnels de l’accès au droit au handicap. Ces personnels, présents en Maisons de Justice, Points d’Accès au Droit… découvrent ainsi que l’usager qui fait répéter, qui répond à côté, n’est pas forcément « un peu simple » ou distrait mais tout simplement malentendant. Nous abordons avec eux la lecture labiale, le Langage Parlé Complété, ainsi que tous les outils technologiques qui viennent compenser la surdité.

Il reste beaucoup à faire, notamment en termes d’aménagement matériel (boucles magnétiques, systèmes de communication amplifiée par casque…), mais le premier pas est de faire réaliser à ces professionnels que les malentendants existent, nombreux, et que ce handicap invisible est un handicap partagé nécessitant une participation active de leur part à la compensation. Les professionnels de la justice sont en demande d’informations sur le handicap. Droit Pluriel travaille avec chaque corps de métiers pour identifier les difficultés et construire ensemble les réponses. Par exemple, Dominique Dufournet (Vice-Président du BUCODES) a attiré notre attention sur la difficulté de certains malentendants confrontés à des notaires qui exigent la présence de témoins (NDLR : article daté du mois de janvier 2018 dans le numéro 28 de 6 millions de malentendants).

Nous avons dès lors saisi le Conseil Supérieur duNotariat de cette situation. Un rendez-vous est fixé avec eux pour nous permettre de dégager des solutions qui seront relayées auprès de la profession. Pour que la justice se modernise et s’adapte, nous avons donc besoin de vos retours de terrain.

L’enquête nationale de la mission « Professionnels du droit et handicap » nous a montré aussi que les malentendants, de leur côté, ont encore trop tendance à cacher leur surdité : ils préfèrent faire répéter ou risquer de répondre à côté plutôt que de dire leur handicap. Cette dissimulation empêche l’interlocuteur professionnel du droit de comprendre les comportements ou réponses inadaptés du justiciable. Droit Pluriel veut donc encourager les malentendants à affirmer leur surdité et ainsi donner les clefs à l’autre pour une conversation confortable. Notre rôle est donc aussi d’intervenir auprès des publics concernés pour les accompagner dans leurs relations avec la justice. L’association Droit Pluriel est convaincue que le dialogue, l’échange et la rencontre permettent de faire avancer les mentalités. Il faut informer, former et que chacun comprenne que tout le monde est concerné car une justice équitable, ce n’est pas l’affaire d’une minorité handicapée mais bien notre affaire à tous.

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